Interprétations de certains éléments du mythe d’Héraclès et l’hydre de Lerne, et les différences iconographiques entre Corinthe et Athènes.

Nous vous proposons ici d’apporter des pistes d’interprétations de certains éléments du mythe d’Héraclès et l’hydre de Lerne, et de constater des différences d’iconographie du mythe entre Corinthe et Athènes.

Marjorie Susan-Venit est spécialiste de l’art et de l’archéologie du monde méditerranéen antique. Elle a publié en janv.-mar. 1989 Herakles and the Hydra in Athens in the First Half of the Sixth Century B. C., extrait d’Hesperia: The Journal of the American School of Classical Studies at Athens, Vol. 58, No. 1, que nous avons trouvé sur le portail JSTOR. Elle propose une étude d’Héraclès et de l’hydre de Lerne à Athènes pendant la première moitié du VIème siècle av. J.-C., en partant d’une œuvre précise : les fragments du canthare attique à figures noires de Naucratis conservé au musée gréco-romain d’Alexandrie. (p.99)

Elle aborde dans un premier temps le mythe d’Héraclès et l’hydre de Lerne, et mentionne qu’Héraclès est aidé par le guerrier Iolaos, que l’hydre est une œuvre d’Héra et qu’elle est tuée par les deux guerriers. (pp.99-100)

Le mythe d’Héraclès et de l’hydre de Lerne serait un des plus vieux mythes représentés dans l’art. L’une de ses plus vieilles représentations se trouve sur une fibule du VIIème siècle av. J.-C. (M. Susan-Venit en détaille la scène), ce qui tend à montrer que l’iconographie du mythe est déjà établie avant sa représentation sur les vases à figures noires. Elle montre aussi un parallèle avec le poisson représenté sur la fibule qui domine la scène et le domaine aquatique de l’Hydre. (p.100)

Ce mythe apparaît  souvent représenté sur les œuvres du Péloponnèse car c’est là où se situe l’action (Lerne). Cependant seules 34 représentations du mythe en figures noires ont été retrouvées à Athènes. (p.101)

Marjorie Susan-Venit, Croquis du fronton de l'Acropole d'Athènes.

M. Susan-Venit décrit par la suite la représentation (ses personnages, sa disposition, ses caractéristiques etc.) du mythe d’Héraclès et de l’hydre de Lerne située sur un fronton de l’Acropole d’Athènes. (pp.101-103)

Puis elle aborde la vision de John Boardman, historien de l’art et archéologue, selon laquelle le thème d’Héraclès qui lutte contre le Triton (l’objet de deux frontons de l’Acropole), relaterait la victoire de Pisistrate quand il s’empare de Nisée, le port de Mégare, et est arrivé au pouvoir à Athènes en 561 av. J.-C. Ce serait pendant son règne qu’aurait été créée la figure de l’Hydre sur le fronton. Ainsi Héraclès serait le symbole de Pisistrate, et l’hydre de Lerne, par ses neuf têtes, rappellerait les neuf archontes qui gouvernaient Athènes et qui donnèrent le pouvoir à Pisistrate. (pp.103-105)

M. Susan-Venit note des différences entre le style et l’iconographie corinthienne et du peintre de Prométhée malgré le même sujet du mythe d’Héraclès et de l’hydre de Lerne. Pour ceci, elle décrit et analyse plusieurs œuvres (fronton E851 du Louvre, et fronton C10506 du Louvre). (p.105)

Ensuite elle décrit le col ovoïde de l’amphore du peintre de Kyllenios, et observe une différence entre le fronton de l’Acropole et l’iconographie du peintre de Kyllenios, ainsi que du peintre de Prométhée. Sur le canthare d’Alexandrie est présente une version unique du mythe, basée sur les modèles corinthiens mais avec une pensée nouvelle. Puis elle décrit sa composition matérielle. (p.106)

Elle continue de décrire des fragments du vase d’Alexandrie, les 9383 et 17206, et pense que les décors choisis par le peintre d’Alexandrie sont comparables à ceux des exemples attiques. (p107-108)

Enfin elle ajoute que les fragments du vase d’Alexandrie sont difficiles à interpréter, mais que « comme leurs homologues corinthiens, les peintres à figures noires attiques montrent régulièrement Héraclès attaquant l’Hydre par la gauche, alors que la composition attique normale est plus probablement asymétrique : un clin d’œil au fronton de poros. Le héro saisit une des têtes de l’hydre de sa main gauche et brandit son arme de sa main droite ». (p.109)

M. Susan-Venit traite pour finir de l’attribut d’Héraclès : la peau de lion, à travers des exemples (fragments du vase d’Alexandrie, le relief en bronze de Samos, un alabastre proto-corinthien). Elle mentionne le vase François qui est le seul vase attique à figures noires sur lequel il y a la scène d’Héraclès et l’hydre de Lerne avec Héraclès qui étend sa peau de lion comme un bouclier. La peau de lion devient donc une protection emblématique. Puis elle tente de comprendre qui est le peintre du vase d’Alexandrie. (pp.109-112)

Elle conclue que le vase d’Alexandrie est une des œuvres majeures des vases attiques à figures noires de la première moitié du VIème siècle av. J.-C. qui dépeint le mythe d’Héraclès et de l’hydre de Lerne. (p.113)